samedi 26 janvier 2013

Maïeutique

Burne Jones : la mort de Méduse


Retirons la mémoire, princesse damnée,
 Cassandre sinistrée, mensongère Circé,
 Pétrifiante Méduse vaincue par Persée,
Va ravauder le temps en filant les années.

 Ôtons tout le vécu de nos tissus de chair,
Ce que l' aube a séché de nos suées de pleurs,
 Ce que le crépuscule a étoilé de fleurs,
 Les minutes haïes, les heures payées cher...

 Va faire des enfants à la métempsychose.
 Supprimons l' arrogance de nos certitudes,
 Les réflexes forcés,les nobles servitudes,
 Recule ô mon orgueil c' est à toi que je cause!

 Vade retro confort des cages adorées,
 Mort au ronronnement des soyeux traversins,
 Apposons nos vétos à tout rire porcin,
 Qu' occis soit le foetus des haines abhorrées.

 Mais que restera-t-il après ce nettoyage?
 Quelques cailloux lancés par une main menue,
 Ma palpitante peau espérant ta venue,
L' atomique fusion des ultimes voyages.


mercredi 16 janvier 2013

fleur bleue

Merci à F.D pour cette sublime chanson qui a inspiré cette petite digression. Alexander John White

 Les pores de ta peau de fruit hurlaient famine,
 Bleus les yeux, bleu le ciel, bleues les moitiés d' orange,
 Tout un monde immortel dans ta pupille d' ange
 D' éclore si pressé, ces globes des gamines.

 L' enfance est un velours aux formes arrondies,
 La glaise glisse au long des angles adoucis,
 Les bouquets de bluettes chassent les soucis,
Toute larme est dissoute en de savants non-dits.

 Ce velours bleu des jours te tissait ton linceul,
 L' arachnéenne trame en forme d' échiquier
 Déchiquetait le fil des lendemains inquiets,
 Il faut penser ses bleus, il faut se panser seul.

 Le sablier se vide et la froideur se sent,
 Des mains d' inquisiteur ont posé sur ta bouche
Les scellés.Le nom de qui a souillé ta couche,
 Etoilé tes dessous d' astérisques de sang,

 Le vent va l' avouer sur les murs des falaises,
 Aux roches balayées par le ressac qui fouette
Les algues de velours, bercées du chant des mouettes,
 Comme la mer est bleue, comme douce est la glaise...


mercredi 9 janvier 2013

opera bouffe

Picasso: dom Quichotte



Traître de corps , pourtant, il te faut te nourrir.
 Vile et faible charogne condamnée aux vers,
Ta peau nacrée bleuie, pâlit et vire au vert
 En cas de jeûne austère au risque de mourir.

 Quelle malédiction nous valut la sentence
 D' oublier chaque jour notre nature ailée,
De ciel et d' océan et de forêts mêlés,
 Condamnant l' estomac à d' infectes bombances.

 Nous les voués aux cîmes, destinés aux crêtes,
Pourquoi choir dans l' abîme des orgies païennes,
 Sommes nous des vautours, des prédateurs, des hyènes,
Ou d' ascétiques saints doublés d' anachorètes?

 La politesse veut qu' aux plats l' on fasse honneur,
 Je vomis l' étiquette aux sottes convenances,
Ces fêtes aux relents arrières goûts de rance
 Vont précéder l' Ankou, l' ultime moissonneur.

 Si ce faucheur zélé à l' oreille chuchote
 Qu' enfin il est grand temps, que mon heure est venue,
Je veux pour mon tombeau un cadavre menu,
Tout charnu d' idéal, efflanqué Dom Quichotte.