lundi 3 août 2015

L'âme hors peut danser



Palma Giovani, la piscine probatique

Je l’ai haï enfant, je l’ai haï plus tard, je l’ai haï toujours,
Poings serrés, reins crispés, corps brisé, pleurs tenus,
Farouche, écorchée, écartelée, moitié nue,
Brûlante, déferlante, hurlante, un ancien four…

Le grand inquisiteur, le séquoia immense,
Enraciné dans moi comme un virus vorace,
Coupé de son passé, renié de toute race,
N’a pas osé finir ce qui ne se commence.

Et le voilà mourant, brisé, rafistolé,
Cousu de filaments comme un vieux transistor,
En réanimation, plus de droits ni de torts,
Juste un pauvre mendiant déchu, auréolé ;

Lépreux, bancal, muet, pauvre de l’Evangile,
Doigts tremblants, larme aux joues, plus qu’un souffle fragile,
Comble de l’ironie, virevoltante, agile,
Une madone noire est l’ultime vigile.

Sentinelle postée je vis l’obscur fantasme,
Moi l’être morcelé, caméléon ou phasme,
J’observe sa toux rauque, ses suées, ses spasmes,
Cruel détachement, « Quel morbide marasme ! »

Le temps thaumaturge tarit toute tumeur.
Ses sanglots sonnent vrais, ces remords –là demeurent,
Non le bruit ne court pas, non vaine est la rumeur,
Je l’ai maudit vivant, je l’aime quand il meurt.

Reprends vie, prends haleine, prie à pleine veines,
Plus vite le cœur bat, l’horloge est remontée,
La rage nous re-mord en sa course éhontée,
Lutter dur dans l’arène au plus fort de nos gênes…

Qu’a-t-il vu quand d’ici se coupait le cordon ?
Comment a-t-il guéri, quel onguent, quel remède ?
De quel ordre fut donc ce céleste intermède ?
Je ne le sais ,mais il a demandé pardon.