mardi 24 janvier 2012

les sanglots lents des violents

Guérin: Clytemnestre

 Peu importent les routes qui les amenèrent
Aux tortueux desseins des paumes de leurs mains,
Pour tous ceux qu' un oubli plaça sur leur chemin,
Ma vengeance vomit le sort des tortionnaires.

Ni les pleurs ni les âcres cris des Erinyes,
Nulle geôle honnie, nul brasier de géhenne,
Ne sauraient apaiser la légitime haine
Des abîmés au nom d' un mal indéfini.

Ils peuvent bien arguer leur passé, la démence,
Mon coeur sec de pitié crève de leur laideur
Et maudit l' indulgence éhontée des plaideurs
Replongeant la griffure dans la plaie immense.

Aucune guillotine,aucun pénitencier,
Pour l'offense infligée, ni peine capitale,
Vie de perpétuité ou injection létale,
Ne pourront araser ce bancal balancier.

vendredi 20 janvier 2012

come home wealth

Waterhouse: Apollon et Daphné



Le soldat des tranchées aspirant à la trêve,
Malade condamné d' un divin diagnostic,
Oublié du destin au sombre pronostic
Ne tendrait pas plus avidement à son rêve.

Quand la ténèbre haïe hisse son drapeau blanc,
Crevant de l' horizon les murailles opaques,
Quand la crucifixion débouche sur la Pâque,
Le ciel est transparent de bleus sans faux semblants.

Voilà, nous sommes deux pour percer nos blessures,
Entends-tu? mon souffle réapprend enfin à respirer,
Je vois que ton mal être a cessé d' empirer,
Mon regard t' idolâtre et ta voix me rassure.

Franchiras- tu le seuil, mon profane messie,
Seras-tu terrifié par une sainte frousse
De ce sauvage lieu plus cruel qu' une brousse,
Immobile au vantail et le geste indécis?

Ne crains rien, je ne suis que la reine Didon,
Amante sacrifiée insoucieuse du faste,
Si tu m' abandonnais, le dernier de ma caste,
Je me consolerais avec Poseïdon.

Viens, palpe à pleines mains notre ailleurs mordoré,
Ce toit de canopée plus solide que marbre,
Moi ,friable statue, la nymphe de ton arbre,
J'accepte dans mon temple un Phoebus adoré.